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COP21 : Dans les boues toxiques de VALE-INCO et BHP.

lundi 30 novembre 2015, par SUB-TP-BAM RP

« On a entendu un bruit horrible et on a vu la boue qui s’approchait. Nous sommes sortis en courant. C’est un miracle que nous soyons en vie ». Ainsi est racontée la catastrophe industrielle de Bento Rodrigues au Brésil, par Valéria de Sousa, 20 ans et en pleurs dans le gymnase de Mariana où elle a trouvé refuge.

Etat de crise

Son village est submergé, charriant les cadavres de 35 personnes au moins, après la rupture d’un barrage minier d’exploitation de fer de la société SAMARCO. La boue toxique qui se répand sur plus de 60 km, provoque des ravages environnementaux sans précédent dans une région placée en état d’urgence.

SAMARCO, l’entreprise minière assure que tout va « presque » bien par l’intermédiaire de son ingénieur des mines Germano Silvo Lopes, chargé de la communication de crise et coordonnateur du plan de secours pour l’entreprise. Ils indiquent que les boues ne seraient pas toxiques...mais on passe quand même les quelques 500 rescapés de ce cauchemar à l’eau et au savon. Le syndicat des mineurs travaillant sur le site [1] indique que des produits chimiques étaient régulièrement déversés dans les bassins de rétention en toute illégalité. Encore une fois, le patronat est plus préoccupé d’effacer ses manquements quitte à augmenter le nombre de victimes par empoisonnement que d’assumer immédiatement ses responsabilités.

Après quatre secousses sismiques, SAMARCO affirme avoir envoyé une équipe d’inspection qui n’a rien détecté d’anormal. C’est souvent (toujours) le cas dans les procédures d’autocontrôle patronal permettant d’évoquer la fatalité, la faute à pas de chance mais certainement pas les mauvais choix d’irresponsables assassins à la tête de ces entreprises.

Le maire de Mariana, Duarte Junior est dans le déni et affirme qu’il n’y a qu’un mort de crise cardiaque. Les autres ont juste disparu. Selon le témoignage d’un ouvrier de la mine, deux enfants et deux adultes ont été happés sous ses yeux par la coulée de boue de presque dix mètres de haut. On retrouvera ces victimes et les autres dans des milliers d’années quand une autre entreprise décidera de scalper la montagne pour ses profits.

Au SUB, on s’interroge au-delà des communiqués des larbins patronaux ou du journalisme de la fainéantise.

SAMARCO, c’est un groupement d’entreprises déjà connu, un mariage entre BHP BILLITON, l’Australienne, et VALE, la Brésilienne.

VALE-INCO

VALE, est née en 1942 après les accords de Washington prévoyant les transferts de propriété des mines exploitées jusque-là par la British Itabira Company, à la Companhia Vale do Rio Doce (CVRD). C’est une société d’économie mixte à capitaux publics créée pour l’occasion, avec un financement américain.

La reprise en main de l’industrie d’extraction aurait pu profiter aux travailleuses et travailleurs pour développer un pays gangréné par la misère qu’illustre ces favélas, bidonvilles accrochés à la montagne telles des tiques attirées par la promesse de jours meilleurs, mais...

Mais il ne faut pas oublier la corruption politique. En 1997 la CVRD devient l’entreprise la plus rentable du pays (sur l’exploitation de ses travailleuses et travailleurs) et le gouvernement de Henrique Cardoso signe sa privatisation engagée deux ans plus tôt.

Murilo Ferreira, PDG de VALE-INCO

Donnant l’entreprise publique pour 3.14 milliards, elle en vaut désormais 47. En treize ans, sa valeur est donc multipliée par 15. Merci les gars. En 2009, l’entreprise rémunère ses actionnaires à hauteur de 2,75 milliards de dollars soit beaucoup plus que le total des salaires de ses employés, cotisations patronales comprises.

Pour les Brésiliens et les population en travers des mines Vale-Inco, c’est expulsion ou pollution. Comme au Mozambique, en Indonésie, on déplace des milliers de personnes sous la menace de para militaires. Au Pérou des séquestrations et des enlèvements se sont produits.

Quand aux pratiques anti-syndicales de cette multi-nationale dans des pays dits démocratiques, on est plus dans la cours du dialogue social. Vale-Inco a été confronté à des grèves massives ces dernières années au Canada [2]. Utilisant les briseurs de grèves et l’intimidation jusqu’au domicile des syndicalistes, les faisant filmer jusqu’à chez eux par des miliciens privés, nos camarades canadiens ont eu droit à une formation accélérée au « dialogue social » façon Vale-Inco qui comprend un module « harcèlement ».

VALE-INCO et le Goro-gate

Mais Vale-Inco est aussi l’exploitant et l’exploiteur de la mine de nickel du plateau de Goro en Nouvelle Calédonie. Le complexe industriel se compose d’une mine à ciel ouvert, d’une usine de traitement du minerai basée sur le procédé hydrometallurgique et d’un port dans la baie de Prony.

Goro Nickel

Le démarrage progressif du complexe minier et industriel a débuté en 2010. L’usine hydrométallurgique traite la « terre rouge » (ou latérite) comprenant des basse teneurs de nickel inférieurs à 1.7% grâce à un procédé de lixiviation par acide sulfurique à 60 bars de pression.

Ce procédé de traitement chimique du minerai génère des effluents liquides et solides. Les effluents liquides sont traités in-situ dans une unité de traitements des effluents et ensuite rejetés dans le lagon via un canal. Les résidus solides,sont eux stockés dans un bassin de stockage. Le site est classé HRI (haut risque industriel) correspondant à SEVESO II.

En avril 2009, 44 000 litres d’acide sulfurique pur à 98 % se sont déversés dans le creek de la Baie Nord, tuant immédiatement près de 3 000 poissons, crevettes et anguilles, dont des espèces endémiques. La Nouvelle Calédonie est un trésor de la biodiversité marine. En mai 2014, une nouvelle fuite de 100000 litres d’effluents d’acide se déverse dans le creek de la baie Nord.

On peut désormais apprécier les voeux pieux de nos gouvernants quand ils échangeaient la défiscalisation des mines contre le respect de l’environnement [3]...

Il faut rappeler que l’exploitation minière en Nouvelle-Calédonie a été particulièrement dommageable pour l’environnement, notamment dans les années 50 et 60 (...) bla bla bla (...)

Votre rapporteur spécial a été particulièrement sensible à ces questions (d’écologie). A ce titre, on ne peut que se féliciter que l’agrément fiscal, qui ouvre droit à la défiscalisation, soit conditionné par le respect de normes environnementales très strictes. L’aide de l’Etat trouve ainsi sa contrepartie dans le respect strict de ces conditions.

En France, il n’y a pas besoin d’acheter les élus, ils s’offrent gratos au moindre sourire d’industriel corrompu. Au nom de l’emploi, au nom de leur prétention. Pitoyables sénateurs dont on ne sait pas bien s’ils sont toujours vivants ou déjà morts lors des séances.

Des sénateurs au cœur de l’action

Puisqu’on vous dit qu’il n’y a plus de sous ! Commençons par fermer ce sénat remplis de Don Salluste [4].

BHP BILLITON - Le 1er de la bande

BHP BILLITON, c’est, sans rentrer dans le détail, des milliards de bénéfices versés aux actionnaires, la plus grosse entreprise mondiale du secteur minier devant sa copine brésilienne. Avec les métaux qu’elle arrache à la montagne, nous bâtissons. Il est normal pour nous de s’intéresser aux conditions d’extraction des matières premières que nous mettons en œuvre.

Cette entreprise est aussi connue pour avoir pollué les sites aborigènes dans les années soixante, pour le projet Inga III, barrage hydro-électrique au Katanga, dont la capacité pourrait alimenter en électricité toute l’afrique australe mais qui finalement ne produira que le strict nécessaire au besoins de BHP pour l’extraction de l’aluminium.

BHP est propriétaire de la plus grande mine de cuivre à ciel ouvert au monde, "La Escondida" du Chili.

Andrew Mackenzie, PDG de BHP

Ce mastodonte pratique désormais la responsabilité sociale des entreprises pour faire taire les associations de protection de l’environnement, des populations locales qui se regroupent et tirent la sonnette d’alarme quant aux risques de catastrophes sociales et écologiques. C’est le déversoir de vaines promesses qui masque mal la loi du plus fort.

Le résultat est là. Des vies ensevelies sous des tonnes de déchets.

Combien de morts, des centaines d’hectares noyés dans la pollution durable, sont encore à prévoir au nom de ces trusts ?

Nous voyons comment la lutte locale n’a plus de prise sur ces multinationales minières. Chaque mine est dépossédée de son poid économique, on ne pèse pas la même chose quand on représente 30% de la production puis tout d’un coup, 3% au fil des rachats.

Les procès et les grèves locales se succèdent mais ne leur coute plus rien.

Nous au SUB, poussons la réflexion horizontalement, cherchant les ponts entre tous les travailleurs de notre industrie qui est la production du cadre bâti, travaillant de concert avec les secteurs de l’énergie, des transports afin de reprendre le contrôle de nos vies, de notre environnement et des moyens de production.

Dans le secteur du bâtiment très gourmand en matières première issues de l’extraction minière, il est de notre devoir en tant que prescripteur, poseur, convoyeur, de s’interroger sur les pratiques de ces majors de l’extraction, d’y remettre du social et de l’écologique par une solidarité de classe, à l’échelle mondiale.

Au SUB, nous nous devons de former les militants syndicaux de notre industrie répondant à cette question internationale de l’exploitation sans frontière. Comme le disent les camarades canadiens de Vale-Inco, on se découvre militant syndical dans la colère.

Ceux qui engrangent des milliards ont depuis longtemps uni leurs intérêts à l’échelle internationale à nos dépens. C’est fini, nous sommes déjà dans vos mines et dans tout les pays.


Voir en ligne : Sources : Merci à Olivier Pironnet


[1Dont nous ne savons pas le nom, l’ensemble des médias reprenant la dépêche AFP qui se contente d’indiquer le nom du délégué syndical et ne citent pas le nom de l’organisation.

[4Voir la folie des grandeurs.