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Mémoire de pierre : « Être incontournables » : pratiques et perspectives syndicales (7/7)

dimanche 24 septembre 2017, par SUB-TP-BAM RP

Mémoire de pierre : Des tailleurs de pierre syndiqués à la CNT

Partie 7/7 : « Être incontournables » : pratiques et perspectives syndicales

Rappel de la fin de la partie précédente :
Fred :
[…] C’est vrai que sur tous les chantiers où on va, on essaie de défendre une certaine façon de travailler, une certaine façon de respecter le travail. Mais je pourrais dire aussi beaucoup de choses sur le mouvement libertaire, et ses théories sur l’abolition du travail.

Frank :
Vas-y.

Fred :
C’est vrai qu’on a souvent des discussions houleuses avec des copains de la CNT, qui sautent en l’air quand ils lisent notre Bulletin. Parce que c’est vrai qu’on place beaucoup de valeurs dans le travail.

Frank :
C’est la tradition anarcho-syndicaliste. C’est le bon ouvrier qui est le bon syndicaliste. En Espagne, ça a toujours été ça.

Fred :
Oui, et je pense qu’à la CNT on l’a perdue, et même au niveau du Syndicat du Bâtiment. C’est pour cela que je pense que parfois on a du mal à faire comprendre certaines de nos positions au sein de la Confédération. On a une tradition de métier, on a en plus une tradition dans le syndicalisme, qui n’est pas à mettre à la poubelle. Une tradition qui existait dans la CGT, la CGT-SR, et même encore avant, dans le compagnonnage. Avec des forts en gueule, qui n’ont pas leur langue dans leur poche, avec un discours, un langage, un code, tout un tas de choses. Je crois que plus qu’ailleurs au sein de la CNT on a cette appartenance sur laquelle on travaille.

Frank :
Penses-tu que les copains de la CGT avec qui vous avez lancé la chambre syndicale réagissent comme toi ?

Fred :
Tout à fait, ils ont fait ce choix organisationnel parce que la CGT leur donne les moyens de faire du syndicalisme. C’est tout. Ils sont sur des bases de lutte de classes, d’action directe, ils sont syndicalistes révolutionnaires.

Frank :
Tous les deux, vu le boulot que vous avez déjà commencé, d’ici cinq ans comment est-ce que envisagez la situation ?

Fred :
Être incontournables. Un tailleur de pierre qui cherche du boulot passe par la chambre syndicale. Ensuite parvenir à avoir un contrôle sur les centres de formation. Aujourd’hui on en discute, on en n’est pas là, on a essayé de gérer le quotidien et surtout de créer un réseau de contacts, d’échanges. C’est surtout là-dessus qu’on travaille actuellement. On est en train de créer une association sur Avignon de tailleurs de pierre, mais secret défense. C’est très fédérateur en tout cas pour les camarades tailleurs de pierre, qui sont intéressés par cette association, son côté fraternel, son aspect confrérie. Pour moi, c’est le compagnonnage qu’ils veulent, le vrai, sans le frou-frou, le folklore.

Frank :
Vous voulez donc une chambre des tailleurs de pierre qui essaie d’avoir une vision de la formation à l’emploi et la façon de faire le boulot. Et vous voulez qu’on vous foute la paix sur la façon de vous organiser.

Fred :
Non ce n’est pas ça. Au niveau du Syndicat du Bâtiment d’Avignon, pour la plupart des camarades, on est adhérent à la CNT, et on est même en avance dans les cotisations. On a cette appartenance : pour nous la CNT se situe aussi dans la tradition du syndicalisme tel qu’on le conçoit, celui de la CGT du début du XXème siècle. Ce sont nos références. La grève qu’on a faite (note : en novembre 2000), c’est au nom de la CNT. On n’apparaît pas en tant que Syndicat des travailleurs de la pierre. C’est une commission de travail. On n’a aucun pouvoir décisionnel au moment du Congrès [en tant que commission].

Frank :
Il serait peut-être envisageable qu’une chambre syndicale des tailleurs de pierre se développe et, d’ici trois ou quatre ans, se réunisse avec une fédération de petits syndicats du bâtiment, pour continuer son chemin.

Fred :
Il est bien évident qu’au vu des positions de la Fédération du bâtiment de la CNT aujourd’hui, s’il n’y a pas une évolution qui va dans le sens de ce que l’on souhaite - créer des sections d’entreprises dans les boîtes, ce qui est notre objectif -, c’est très difficile d’avancer. Aujourd’hui des camarades sur Avignon travaillent dans des grosses boîtes, monuments historiques du Vaucluse, de la Provence, et même dans des boîtes nationales : quels moyens on leur donne pour développer un syndicalisme de lutte de classes et d’action directe ? Nous, on veut donner des outils aux camarades. Avoir une formation, c’est ça qu’on cherche aussi. Alors on n’attend pas tout de la CNT, mais c’est clair qu’on attend un minimum, sur des bases syndicales de lutte de classes et d’action directe. Et c’est clair aussi aujourd’hui qu’au vu du Congrès, on va transmettre aux camarades du syndicat d’Avignon la teneur des débats (ajouter note sur le Congrès).
Pour terminer sur l’avenir de la chambre syndicale des travailleurs de la pierre : qu’elle soit à la CNT ou pas, si demain les camarades de la chambre syndicale décident de s’organiser de manière autonome, ça se fera, si la chambre syndicale décide d’adhérer à une autre Confédération, ça se fera aussi.

Fin de l’entretien

Pour revenir au début de cet entretien :
Partie 1/7 : État du syndicalisme dans le bâtiment
Partie 2/7 : Taille de pierre et compagnonnage
Partie 3/7 : « La Fraternelle »
Partie 4/7 : Qu’est-ce que la conscience de métier ?
Partie 5/7 : « Un apprenti est là pour en chier dans le bâtiment » : la formation des tailleur.se.s de pierre
Partie 6/7 : « Être incontournables » : pratiques et perspectives syndicales