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Renifler le cul de DSK et oublier les bourses d’Eiffage ?

Retour sur l’affaire Eiffage-DSK

lundi 9 février 2015, par SUB-TP-BAM RP

Alors que s’ouvre le procès de de "l’affaire du Carlton", la vague médiatique s’intéresse essentiellement à l’affaire de mœurs, normal elle est au cœur de la procédure. Et le sexe fait vendre, avant l’enquête se situe la gamelle. La playmate de la page 3 du SUN, c’est donc Dodo la saumure et DSK en version française.

L’abus sexuel de la classe dominante n’est pas une nouveauté. Du droit de cuissage des nobles aux orgies de la 5ème république, les soudards [1] n’ont pas changé, "par la force et l’argent" est leur devise.

Ce n’est pas exclusif aux plus hauts placés car entre les orgies de DSK et le petit cheffaillon grattant sa secrétaire avec ses brindilles de doigts, il n’y a pas de différence d’intention mais seulement de moyens.

Ce procès est un éclairage de ces pratiques de domination mais tant qu’il y aura des positions hiérarchiques où les hommes auront un pouvoir sans contrôle sur les femmes, le problème ne sera pas réglé. Tant que la classe dominante ne sera pas dissoute, cela se reproduira, c’est la nature même de sa domination.

La mise en accusation pour proxénétisme dans ce procès ne supprimera pas ce problème de domination à lui seul. La racine de cette situation est pour nous le financement de soirées de prostitution d’un candidat à la présidence de la république par des cadres supérieurs d’Eiffage, une major du BTP profitant de marchés publics. Et ce volet sera absent du procès.

Dans le dossier du Carlton, il existe un deuxième procès qui pourrait être plus déterminant dans l’élimination de ces situations d’orgies du pouvoir, celui porté par le groupe Eiffage lui-même pour abus de biens sociaux. Si ce procès dépasse le cadre que voulait lui donner Eiffage bien sur.

Sept jours après que David Roquet, directeur de Matériaux Enrobés du Nord (une filliale d’Eiffage) ait été mis en examen pour proxénétisme dans l’affaire de moeurs, il était mis à pied par le groupe qui lançait également une procédure civile pour abus de biens sociaux contre lui.

Dans le JDD, Pierre Berger, PDG d’Eiffage disait à ce moment : « C’est une affaire David Roquet, pas une affaire Eiffage. ». Plus tard, Eiffage licenciait aussi le directeur des travaux publics d’Eiffage du nord, Jean-Luc Vergin au titre de sa responsabilité de co-signataire-vérificateur des dépenses du groupe.

Ce réflexe plavlovien [2] consistant à nettoyer l’encadrement pour éviter les éclaboussures est en train de se retourner contre le groupe Eiffage. Il est de notoriété publique que la faute suprême des cadres supérieurs d’entreprise vis à vis de leurs pairs est de se faire prendre. Ils peuvent tout faire sauf se faire prendre. Il existe un contrat tacite non formulé entre ces cadres de haut-niveaux, le bouffon qui se fait prendre doit creuser sa tombe avec sa pelle sans rechigner pour l’image du groupe. Au syndicat, nous interprétons les déclarations d’Eiffage selon ce point de vue.

Seulement, comment compter sur l’honneur dans un milieu où il n’existe pas, qui plus est, avec un encadrement supposé participer à la traite humaine. David Roquet a donc logiquement balancé la hiérarchie d’Eiffage en pointant l’ordre hiérarchique de corrompre le candidat présidentiel DSK.

La justice se doit d’instruire à décharge de l’accusé. A Eiffage de donner les éléments prouvant qu’il n’y a pas eu ordre. Dans ce cadre, l’enquête devra chercher aussi si David Roquet avait bien des ordres et qui les lui a donné jusqu’à l’origine du commandement. Elle se doit donc de perquisitionner au siège Eiffage qui sera certainement très coopératif... Et voici comment la justice commence à fouiller aussi dans l’attribution de la construction du stade de foot de Lille.

Le chantier du stade de Lille

Ce n’était certainement pas le résultat escompté par Eiffage. Son haut-encadrement a ouvert la boite des pandores. [3]

Au syndicat Unifié du Bâtiment, nous attendons le résultat de ce deuxième procès qui peut avoir des retombées dans notre industrie en cas de condamnation. On regrette toutefois que le lien entre le trafic d’êtres humains et la collusion des intérêts de pouvoir et économiques entre politiques et majors du BTP n’ai pas été fait avec ces procès séparés d’une même affaire. Mais il ne fallait pas trop attendre d’une justice désormais à thèmes par trop dépendante du pouvoir politique.


[1Soldat envahisseur, pilleur et violeur

[2Pavlov a fait considérablement avancer les recherches sur les réflexes conditionnels. Ces réflexes peuvent s’apparenter à une réaction involontaire, non innée, provoquée par un stimulus extérieur. Pavlov a développé la théorie selon laquelle les réactions acquises par apprentissage et habitude deviennent des réflexes lorsque le cerveau fait les liens entre le stimulus et l’action qui suit.

[3"la boîte des gendarmes", autrement dit du "panier à salade". Croisement du mythe grec de la "boîte de Pandore", une boite contenant le malheur qu’on ouvre sur soi sans se rendre compte et de pandores, argot désignant le gendarme (à l’origine un nom de mollusque)