Accueil > Dossiers du BTP > Amiante & Maladies Professionnelles > L’Actinolite, n’est pas le nom savant d’un joli papillon

L’Actinolite, n’est pas le nom savant d’un joli papillon

Où alors, il est de ceux qui cachent une tête de mort au creux des ailes.

mercredi 22 octobre 2014, par SUB-TP-BAM RP

Si elle vole aussi le long des autoroutes, cette particule d’amiante, contenue dans certains enrobés, se libère lors des travaux de démolition, de déconstruction ou de rabotage de chaussées.

Le décret 2012-639 du 4 mai 2012, qui a étendu aux opérations de voiries les obligations de gestion des risques sanitaires liés à l’amiante, visait jusqu’ici certains enrobés renforcés entre 1970 et 1995 par des fibres d’amiante de type « Chrysotile », pour améliorer les performances mécaniques des enrobés.

Si l’on connaît la quantité approximative globale d’amiante qui a été utilisée pendant cette période, il est en revanche impossible d’effectuer un recensement géographique exhaustif des chaussées qui en contiennent.

Pour 2 raisons :

  • Les données de récolement ne sont pas toujours disponibles,
  • L’incorporation dans les chaussées plus récentes d’agrégats d’enrobés recyclés issus de couches potentiellement amiantés amène à considérer que toute chaussée peut potentiellement en contenir.

L’amiante, c’est comme la confiture, ça dégouline par les trous de la tartine …

La circulaire du 15 mai 2013 (ministère de l’écologie) donnait des instructions opérationnelles (cartographie des zones amiantées, modalités d’intervention, gestion des déchets, information du personnel). Les maîtres d’ouvrages ont donc fait réaliser, pour l’ouverture de nouveaux chantiers routiers d’entretien, des tests par des laboratoires qui ont révélé la présence supplémentaire d’actinolite, roche naturelle dont l’une des variétés peut s’avérer amiantifère, dans les granulats d’enrobés.

C’est la crise … de nerfs pour les patrons de la filière

Les patrons de l’asphalte n’en peuvent plus de pleurnicher : Ecolos attaquant les projets, Chantiers suspendus, contraintes sanitaires réglementaires, multiplication des certifications et du devoir d’information des travailleurs, investissements de recyclage des déchets si juteux maintenant menacés, marges plus difficiles, …

Après les hydrocarbures aromatiques polycycliques cancérigène (HAP), l’amiante Chrysotile et maintenant actinolite, il apparait que ces chevaliers de l’industrie chimique, ces docteurs Folamour, tenants du Progrès machiniste, de la Liberté par la consommation de masse et de l’évasion par ruban autoroutier, soient responsables de graves maladies professionnelles.

Le principe de précaution doit bien évidemment toucher aussi les carriers qui sont soumis à la réglementation amiante depuis le 16 juillet 2014.

Le chevalier

Le groupe Vinci, au travers d’Eurovia et du groupe Kleber Moreau, vient de nous jouer, à ce sujet un petit air de chevalier blanc relayé par le moniteur, la voix du patronat. Il est vrai que dorénavant les patrons sont aux portes des prisons pour leur participation à la tuerie de l’amiante. Ça les oblige un peu.

Voici la prose :

Donc, en toute logique, et dans le cadre de la cartographie nationale, définie par Le décret 2012-639 du 4 mai 2012, La circulaire du 15 mai 2013, et son extension aux carrières du 16 juillet dernier, des analyses géologiques, réalisées par le Bureau de recherche et de géologies minières (BRGM), ont été faites dans la carrière vendéenne de granulats de La Meilleraie-Tillay. Elles ont révélé la présence de poussières d’actinolite, et indiquent « un dépassement de la valeur limite d’exposition professionnelle au niveau d’une mesure sur un poste de travail ». Dès réception des résultats de ces investigations, l’inspection du travail a demandé à l’employeur de faire procéder à un contrôle sur site des niveaux d’empoussièrement en fibres d’amiante, en application des dispositions du code du travail.

Et là Patatras !

Eurovia tombe des nues.

Ceux qui pourraient penser que cette entreprise filiale d’un groupe international du BTP, saurait pertinemment (dans une logique économique basique) quelles matières premières contient une carrière que l’on exploite, et les dangers auxquels sont exposés les travailleurs … se trompent.

Eurovia ne savait rien !

Le groupe Kleber Moreau, dans un élan majestueux et civique (et judiciaire), a fermé aussitôt (mais momentanément rassurez-vous) cette carrière pour sauvegarder la santé de son personnel, dont semble-t-il, il se préoccupait beaucoup moins avant ces analyses géologiques OBLIGATOIRES.

« Nous sommes en face d’études contradictoires et dans le doute, notre ligne directrice est claire, il s’agit de protéger les salariés », a indiqué Jean-Claude Pouxviel, président des carrières Kléber-Moreau.

C’est beau comme du Schmidheiny.

Que ceux qui verraient un rapport entre Eurovia, le procès du « cancer du bitume » et cette petite opération de Comm, qui oblige la dizaine de salariés de la carrière à émigrer provisoirement vers d’autres sites, ne sont que des syndicalistes radicaux et haineux.

Et puis à cette période automnale la campagne vendéenne est si jolie, que quelques kilomètres de plus à faire en voiture chaque jour par des salariés exténués (en 2, en 3/8 ?), ne saurait les mettre en danger sur ces chaussées glissantes et amiantées.

Mourir par le boulot … plutôt crever !

Nous ne pouvons qu’inviter les salariés des travaux publics et de l’extraction de se rapprocher des syndicats afin d’être informés de l’évolution réglementaire concernant les conditions sanitaires de l’exercice de leurs métiers, de vérifier si leurs entreprises possèdent les certifications nécessaires, et si les protections individuelles et collectives sont bien toutes mises en œuvre afin d’assurer des conditions de travail réglementaires, à défaut d’être satisfaisantes.

Si au royaume du profit la santé des travailleurs est, pour le patronat, de peu de prix, notre détermination à renforcer l’organisation de classe, qu’est le syndicat, doit lui en rappeler quotidiennement les limites.