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Chez IKEA : Le scratch-test social n’est pas au catalogue
mardi 26 août 2014, par
Après les révélations sur le fichage de ses salariés [1], Ikea est à nouveau sur le devant de la scène concernant, cette fois, le dumping social organisé par les entreprises de transport qui sont sous contrat avec le major de l’ameublement.
« L’esclavage sur les parkings »
Le 16 août dernier, le syndicat belge des transports (UBT-FGTB) dénonçait, par une campagne de tractage devant les magasins de Hognoul, Anderlecht et Gand, des pratiques concurrentielles, malheureusement communes aux divers groupes commerciaux internationaux (Casa, Decathlon, Danone…), qui font appel à des transporteurs locaux, passant par des "sociétés boîtes aux lettres" situées en Europe de l’Est, et employant des chauffeurs payés des clopinettes et devant dormir pendant des mois dans la cabine de leur camion.
Devant de telles dénonciations, Le service de propagande d’Ikea, comme a son habitude, répond ne pas avoir connaissance de ces faits et promet de « réagir » si (et seulement si) on lui en apporte les preuves. Pourtant en décembre 2013, deux routiers sous-traitant pour Ikea avaient été arrêtés alors qu’ils siphonnaient l’essence d’autres camionneurs sur ordre de leur patron. Le procureur de la république décrivait cette affaire sous ces termes :« Ces deux hommes sont les instruments d’un système qui les dépasse. (...) Un phénomène de délit de masse sur l’autoroute. »
Le groupe est un grand adepte de la repentance… quand il se fait prendre
Comme :
- Quand la journaliste Elisabeth Aasbrink était revenue sur les relations d’Ingvar Kamprad (créateur et propriétaire d’Ikea) avec les groupuscules d’extrême droite suédois, pendant, et même après, la seconde guerre mondiale.
- Quand la télévision suédoise avait programmé un documentaire démontrant que le géant du meuble avait utilisé des détenus politiques du régime communiste de l’Allemagne de l’Est pour l’assemblage de meubles dans les années 1970 et 1980, et qu’à sa suite le quotidien conservateur allemand Frankfurter Allgemeine avait révélé, qu’Ikea aurait également bénéficié, à la même époque, du fruit du labeur de prisonniers politiques à Cuba.
- Quand, à nouveau, la télévision suédoise démontrait de quelle manière le groupe s’était domicilié au Luxembourg pour gruger le fisc suédois ou quand la télévision française montrait comment l’enseigne utilise à plein l’optimisation fiscale pour réduire d’environ 40 millions/an ce qu’elle devrait comme impôts en france.
- Quand Ikea retirait de la vente, partout en Europe, ses boulettes de boeuf « mixturées » au cheval puis ses gateaux au chocolat contaminés par des matières fécales.
Nettoyer sous les meubles
Car bien évidemment, dans le blabla environnemental que l’entreprise produit en direction des « Eco-consommateurs Monsieur et Madame tout-le-monde » déambulant dans ses rayons captifs de magasin, elle se veut éco-responsable.
Pour revenir aux questions de transport, dans ce que l’entreprise titre : « moins de camions, plus de sobriété », elle évoque, pour ses dépôts français, le développement de transports fluviaux depuis le Havre ou Anvers, ou du rail depuis Fos sur mer.
Si l’on prête attention au chiffre qu’elle nous soumet (28% d’après Ikea en 2012), il est indéniable que tout ceci demeure peu, et ne cesse d’interroger sur la provenance des produits, arrivant par mer, qui nous sont proposés par cette enseigne : Où sont-ils fabriqués ? A quel coût ? dans quelles conditions sociales et environnementales ?
Les 87% de livraison par route entre dépôts et magasins laissent présager les mêmes conditions de travail que celles dénoncées par les belges.
Ces monstres de la consommation mondialement standardisée, nous ont habitué à de semblables déclarations d’intentions … qui ne résistent évidemment pas au grattage, car on peut juger sur pièces, au regard des révélations précédentes.
Qu’en pensent nos « organisations syndicales dites représentatives » ?
On peut en effet s’étonner :
- que les syndicalistes belges du transport n’aient pas mené cette action avec les syndicats internes d’Ikea.
- Que les syndicats d’Ikea, rassemblés au sein d’Uni Global Union [2], n’aient pas considéré qu’une action internationale, sur le sujet pouvait s’avérer nécessaire.
Mais peut-être que notre article précède une campagne européenne d’envergure, justement en gestation pendant cette période estivale, propice à la préparation d’actions syndicales victorieuses.
Pour ce qui nous concerne, puisque notre champ de syndicalisation englobe l’ameublement, nous ne ferons ici que rappeler quelques revendications principales de notre syndicalisme d’industrie :
- Réintégration au sein des entreprises des services externalisés (transport, nettoyage, maintenance, etc),
- Circuits courts de la production à la distribution
- Dé-standardisation des produits de consommation
- Contrôle ouvrier de la chaine de production et de distribution
[1] Débat sur la surveillance patronale chez Ikea à écouter sur sons en lutte.
[2] UNI global union : fédération syndicale internationale, crée en 2000, lors de la fusion de 4 anciennes fédérations syndicales internationales : la FIET (Fédération Internationale des Employés, Techniciens et Cadres), l’IC (Internationale des Communications, ancienne internationale des PTT), l’IGF (International Graphic Federation) et la MEI (Media Entertainment International). Elle regroupe près de 900 organisations syndicales à travers le monde et 20 millions d’adhérents.Le 2 mars 2009 UNI a changé son nom (anciennement Union Network International) en UNI global union.